À la Découverte du Trachycarpus oreophilus (Par Philippe ALVAREZ)

Situé dans le Parc Naturel du Doï Luang Chiang Dao, le Mont (Doï) Luang, troisième plus haut sommet de la Thaïlande, domine la région de ses 2.195 m d’altitude. C’est dans ce Parc Naturel de 1.170 km² situé dans le Nord du pays que trône, au sommet de cette chaîne calcaire baignée de brouillard et orientée Nord-Sud, le Trachycarpus oreophilus, palmier emblématique de la région. Y accéder demande un peu de courage et une bonne forme physique. L’accès n’y est possible qu’à la saison fraîche, de novembre à mars, uniquement sur réservation et avec l’autorisation du Royal Forest Department - Wildlife Reserve Division.

Dans cette région agricole parsemée de rizières, la chaîne montagneuse se présente face à nous comme une barrière aux sommets escarpés quasi-infranchissables et baignés de brume. C’est de la base de ce relief qu’il faudra commencer notre ascension, d’abord à l’aide d’un véhicule sur les 12 premiers kilomètres d’une route asphaltée, puis à pied sur un chemin escarpé.

Du point de départ de notre ascension situé à 1.080 m, à 6h00 du matin, c’est à la lueur des torches que commence vraiment notre trek, sur un chemin boisé en pente douce qui se transforme rapidement en un chemin plus pentu, et c’est vers 7 heures, alors que le soleil pointe ses premiers rayons, que nous apercevons les premiers Trachycarpus accrochés aux sommets.

Vers 9 heures, nous arrivons au premier campement, et continuons notre ascension au centre d’une vallée couverte de végétation (Calamus, Lagerstroemia, lichens, orchidées, fougères, bananiers et bambous, sans oublier le Rhododendron ludwigianum endémique). C’est seulement à 11h25 que nous approchons notre premier Trachycarpus oreophilus, un jeune plant d’environ 1 m de haut, suffisamment proche pour pouvoir le toucher… Nous sommes ici à plus de 2.000 m d’altitude. Notre trek se poursuivra entre descentes et remontées afin d’approcher un palmier adulte, chose difficile étant donnée la configuration du terrain. Nous y parviendrons vers 13h30 à 2.097 m d’altitude. S’en suivra une longue descente pour rejoindre notre voiture située 1.017 m plus bas. Notre périple aura duré un peu plus de 11 heures et c’est épuisés, mais heureux d’avoir pu approcher ce palmier, que nous regagnerons notre guesthouse située en bordure du parc.

Que savons-nous de ce palmier ?
C’est un palmier endémique au Parc Naturel du Doï Luang Chiang Dao qui pousse à flanc de montagne, entre 1.700 et 2.100 m d’altitude, bercé par les vents et soumis à la fraîcheur et au brouillard nocturne et matinal durant quasiment toute l’année.
Considéré à tort comme un Livistona dans les années 1920, ce n’est qu’en 1970 qu’il sera classé parmi les Trachycarpus par le Dr John DRANSFIELD de Kew qui le considèrera alors comme un T. martianus, avant d’être nommé Trachycarpus oreophilus (oreophilus signifiant « aimant les montagnes » en latin) par GIBBONS et SPANNER dans les années 90, suite à leur expédition dans la région.
Utilisé par les villageois des environs pour leurs constructions durant la première moitié du XXème siècle, il finira par disparaître de la partie inférieure des montagnes pour ne subsister qu’à leurs sommets où il s’en trouve actuellement quelques milliers. Il est aujourd’hui protégé par décret royal qui en interdit tout commerce, sous forme de plantules comme de graines, au risque de se voir infliger une forte amende et un séjour en prison. D’un accès difficile et extrêmement règlementé, sous la vigilance permanente de rangers et de guides locaux, il est étroitement surveillé et protégé de tout vandalisme.
De croissance extrêmement lente, il reste une rareté et ne se trouve qu’en peu d’exemplaires dans les collections, les graines et plantules circulant actuellement, notamment en Europe, semblant ne pas avoir de rapport avec le Trachycarpus oreophilus. Il semblerait qu’une autre colonie de Trachycarpus oreophilus subsiste dans les environs, en direction de la Birmanie toute proche…